RELIGION EGYPTIENNE ...

 

 

 

Une amie Egyptienne du surnom d'Aset Louxor ...

Un jour m'a écrit cela, article pris dans Historia.

 

Texte provenant de CHRISTIAN CANNUYER ...

Professeur à la faculté de Lille et président de la Société belge d'études orientales.

Sic : " La civilisation égyptienne est à ce point liée à la religion pharaonique que la disparition de l'une coïncide avec celle de l'autre, qu'on peut situer au tournant des IIIe et IVe siècles de notre ère. Comment a pu s'éteindre cette religion qui, durant près de trois millénaires et demi, avait comblé l'imaginaire de tant de générations et nourri une éthique d'une remarquable qualité ?

Sans doute la disparition de la royauté pharaonique, consommée avec la conquête d'Alexandre (332 avant notre ère), avait-elle déjà porté un rude coup à la cohérence d'une culture où le souverain assurait un lien quasi organique entre le monde des dieux et la société humaine. L'insertion de l'Égypte dans le monde gréco-romain ébranle certaines de ses assises culturelles. Les Égyptiens durent recomposer leurs croyances et traditions religieuses à l'aune de ce qui fut une première mondialisation. La vie religieuse dans l'Égypte ptolémaïque et romaine a néanmoins été caractérisée par une cohabitation constructive entre les cultes anciens et les nouveaux, faite d'adaptations mutuelles. Le « rhabillage » hellénistique et universaliste de la déesse mère Isis, si enracinée dans la glèbe du Nil et devenue pourtant si méditerranéenne, est un exemple non moins éclairant que celui de son compère Sarapis, métamorphose alexandrine d'Osiris. Certes, quelques cultes s'essoufflèrent et virent leur antique gloire s'évanouir, comme celui d'Amon à Thèbes. Mais de nombreux sanctuaires en pleine activité jusqu'aux IIIe et IVe siècles de notre ère, tant à Alexandrie que dans l'arrière-pays, prouvent que la religion traditionnelle restait bien vivante. Quant au rôle essentiel de la royauté sacrée, les prêtres avaient trouvé la parade à sa disparition : les rois grecs et les empereurs romains furent travestis en pharaons pour que la mécanique d'une Égypte gouvernée par le fils de Rê se perpétuât. Ce n'était qu'une fiction, et à la longue, elle révéla ses limites lorsque Constantin fit le choix du monothéisme chrétien en 313.

Le christianisme s'était tôt acclimaté dans le pays, et d'abord à Alexandrie, sans doute dès le Ier siècle, dans le sillage d'une diaspora juive importante et déjà ancienne. La progression de la foi nouvelle venue de Palestine fut lente. À peine 1 % de la population dans la seconde moitié du IIe siècle, si l'on en croit des estimations récentes. Entre 5 et 10 % à la fin du IIIe, malgré le dynamisme de l'école catéchétique d'Alexandrie et l'expansion de l'épiscopat dans la vallée. Mais dès que le christianisme se trouva favorisé par le pouvoir impérial, après avoir été persécuté, l'illusion de la permanence d'une société « pharaonique » présidée par un souverain en lien permanent avec le monde du divin s'en trouva irrémédiablement ruinée. L'ancienne religion ne mourut pas sans douleur.

Le coup de grâce fut violent, porté par les édits de Théodose (391-392) imposant la foi nicéenne à tout l'empire et prohibant les anciens cultes. Lorsque les mesures de fermeture de temples devinrent effectives, le dernier carré des fidèles résista comme il put. Mais c'en était fini. La religion ancestrale se trouva privée de son espace vital, et avec elle tout ce qu'il restait de la civilisation qu'elle avait portée. Les ultimes hiéroglyphes attestés ont été gravés sur un mur du temple d'Isis à Philae le 24 août 394, soit quasiment au lendemain des fatals édits théodosiens."